29 novembre 2024
L’assemblée générale du réseau CARIN au TJ de Paris
Mis à jour le : 03 décembre 2024

Dans l’auditorium du Tribunal judiciaire de Paris, on pouvait rencontrer du 20 au 22 novembre, pas moins de 160 membres du réseau CARIN (Camden Asset Recovery Inter-agency Network), représentant les 61 juridictions et 16 organisations internationales qui en font partie ainsi que les partenaires des réseaux régionaux ARINs.
Ces experts, enquêteurs ou magistrats, tous spécialisés dans l'identification de patrimoine, le traçage, la saisie et la confiscation des avoirs criminels, participaient à l’assemblée générale annuelle du réseau CARIN, réseau informel d'échanges entre forces de l'ordre et autorités judiciaires spécialisées en la matière.
Une coopération internationale toujours plus nécessaire

En 2024, ce réseau présidé par la France, représentée par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc) et la Plateforme d’identification des avoirs criminels (PIAC) de la direction nationale de la police judiciaire, fêtait parallèlement ses 20 ans d’existence.
Carine Chevrier, secrétaire générale du ministère de la Justice a ouvert cette assemblée générale en rappelant tout l’intérêt de la coopération internationale notamment en termes de regard croisé, d’apprentissage mutuel et d’échange de bonnes pratiques mais aussi d’informations plus opérationnelles et juridiques qui constituent les grandes forces de ce réseau. Christian Sainte, directeur national de la police judiciaire, a pris ensuite la parole pour dresser un rapide bilan du chemin parcouru depuis 20 ans durant lesquels le réseau n’a cessé de monter en puissance de manière spectaculaire, avec une augmentation rapide du nombre de ses membres, et toujours plus d’identifications et de saisies réalisées grâce aux échanges permis par le réseau.
La cheffe par interim de la représentation de l’Union européenne en France, Jessica Larsson, a de son côté rappelé toute l’importance de la coopération internationale au moment où la menace de la criminalité en Europe a considérablement augmenté et où les organisations criminelles ne connaissent pas de frontières.
Enfin, Catherine De Bolle, directrice exécutive d’Europol, est ensuite intervenue en vidéo rappelant la fierté d’Europol d’être partenaire de CARIN depuis l’origine.
C‘était au tour des chefs de juridiction du Tribunal judiciaire de Paris de prononcer quelques mots de bienvenue dans cette enceinte judiciaire. Se sont ainsi succédés à la tribune : Stéphane Noël, président du TJ de Paris, Jean-François Bohnert procureur national financier et Philippe Tocannier, procureur adjoint.
Le recouvrement d’actifs en tant qu’objectif politique
À la suite de ces propos introductifs, une première table-ronde consacrée au recouvrement d’actifs en tant qu’objectif politique a réuni un représentant de la Commission européenne et deux parlementaires français. Javier Castillejos Alsina, chef d’équipe, lutte contre la criminalité organisée à la direction générale des migrations et des affaires intérieures de la Commission européenne, a dressé un état des lieux de la menace en matière de narcotrafic -une forme de criminalité qui ne cesse de progresser au sein de l’Union européenne- et dévoilé les réponses que l’Union européenne met en œuvre.
Jean-Luc Warsmann, député et rapporteur des lois du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale et du 24 juin 2024 destinée à renforcer le cadre juridique des saisies et confiscations des avoirs criminels, a insisté quant à lui sur le fait qu’au-delà de l’argent saisi, c’est la paix sociale qui est visée. Etienne Blanc, sénateur et rapporteur de la commission d’enquête sur la lutte contre le trafic de stupéfiants en France, a ensuite détaillé quelques conclusions et pistes ouvertes par cette commission d’enquête. Le sénateur a indiqué que ces dernières nourriront une proposition de loi qui sera examinée à partir du 27 janvier 2025 au Sénat puis à l’Assemblée nationale.
Des ateliers de travail aboutissant à des recommandations concrètes
Le lendemain matin, chaque participant a rejoint un des quatre ateliers de travail. Ces derniers, réunissant environ 40 personnes, ont étudié un même cas pratique : un dossier de trafic international de stupéfiants. Les groupes ont échangé autour de ce dossier, chacun évoquant son expérience, partageant son expertise, expliquant la législation dans son pays en matière de lutte contre le trafic de stupéfiants, de saisie, de gestion, de confiscation des avoirs…
Quatre axes de travail étaient proposés aux groupes afin d’aboutir à de nouvelles recommandations au nom du réseau CARIN formalisées à l’issue de chaque assemblée générale :
- De quels outils législatifs dispose-t-on pour lutter contre le trafic de stupéfiants ?
- Comment identifier plus efficacement les biens des trafiquants ?
- Quelles sont les stratégies de détection du blanchiment d’argent lié au trafic de drogue ?
- Comment améliorer la coopération internationale entre CARIN et les ARINs ?
Une vente aux enchères ouverte par le garde des Sceaux
Parallèlement à l’assemblée générale, les membres du réseau CARIN ont pu assister à une vente aux enchères exceptionnelles organisée par l’Agrasc, qui s’est tenue au sein même du TJ de Paris. Cette vente, intitulée Trésors cachés de Paris, a été ouverte par Didier Migaud, garde des Sceaux, ministre de la Justice. Cet événement, qui a porté sur environ 450 lots, visait à illustrer comment peuvent être valorisés les biens remis à l’Agrasc.
Le garde des Sceaux en profitait en l’ouvrant pour « saluer le travail de chacun, les enquêteurs, les policiers, les magistrats, greffiers… » ainsi que « le travail fait par l’Agrasc dont les missions n’ont cessé de croitre, développant son emprise territoriale avec la création d’antennes régionales ».
La vente a permis de récolter 1 072 215 € au bénéfice du budget général de l’État et des fonds de concours stupéfiants et lutte contre le proxénétisme.
Le Royaume-Uni succède à la France
Le dernier jour de l’assemblée générale, Alex Pérez, spécialiste principal des crypto monnaies au centre européen de lutte contre la criminalité financière et économique (EFECC) d’Europol est intervenu pour exposer comment s’opère de manière pratique la lutte contre le blanchiment d’argent menée par l’institution.
Une présentation des différents réseaux ARINs par leurs représentants et une table-ronde sur les 20 ans du réseau CARIN, qui réunissait plusieurs anciens secrétaires du réseau et anciens membres du steering group (comité de pilotage), se sont enfin succédées.
L’assemblée générale s'est clôturée par la passation de la présidence du réseau CARIN de la France au Royaume-Uni, pour l’année 2025. La Lettonie lui succédera en 2026.